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Les malheurs du premier homme dans l’espace

La télévision russe vient de révéler que le vol historique de Iouri Gagarine, en avril 1961, s’est bien mal déroulé. Le cosmonaute a failli y laisser sa peau.

Russie

14/04/1999 - Le 12 avril 1961, Iouri Gagarine devenait le premier homme à être allé dans l’espace et se méritait le titre de « Héros de l’Union Soviétique ». Mais son voyage d’une heure 28 minutes n’a pas été de tout repos, vient de révéler la télévision russe. Selon un rapport enregistré le lendemain du vol historique, le cosmonaute a frôlé la mort à deux reprises et a bien failli se retrouver... en prison.

Premier problème : la capsule dans laquelle prenait place Iouri Gagarine a tardé à se séparer du vaisseau Vostok. « J’ai compris qu’il y avait un problème. J’ai décidé de ne pas paniquer. » a­t­il déclaré dans son rapport. En fait, la séparation s’est produite 10 minutes plus tard que prévu. Le délai a fait dévier l’engin de l’orbite prévue.

Second problème : la soupape de respiration du scaphandre s’est coincée dans une fermeture éclair. À moitié suffoqué, le cosmonaute a mis six interminables minutes à la libérer.

Enfin, l’atterrissage de la capsule ne se fait pas sous les acclamations de la foule, comme le montrent les images officielles. Iouri Gagarine se pose au milieu d’un champ isolé, où son apparition en scaphandre terrifie une paysanne et sa fille. Il se met ensuite à la recherche d’un téléphone pour signaler son arrivée. Un avion militaire vient finalement le chercher, mais les services secrets ne croient pas son histoire. Seul son certificat de cosmonaute, qu’il conservait sur lui, parvient à les convaincre.

Iouri Gagarine est mort sept ans plus tard lors d’un atterrissage raté, aux commandes d’un petit avion d’entraînement. Les circonstances exactes de sa mort n’ont jamais été révélées

Yuri GAGARIN

Né le 09 mars 1934, il est le premier humain envoyé dans l'espace à bord de VOSTOK 1, le 12 avril 1961 depuis le centre de lancement de Baïkonour. Ce vol durera une heure et quarante-huit minutes en parcourant une orbite unique autour de la Terre.

Les 09 et 25 mars 1961, le vaisseau cosmique soviétique a été expérimenté avec succès. La décision a été prise : le prochain véhicule emportera dans l'espace Youri Gagarine.

Accompagné par sa doublure Guerman Titov et par le général Kamanine, Youri arrive à Baïkonour au début avril. Sergueï Pavlovitch Korolev, constructeur principal des fusées et engins cosmiques, leur présente son projet de plan de travail. Le vol pourrait avoir lieu le 10 ou le 11. Mais les ingénieurs refusent de fixer un délai trop précis : "on lancera le vaisseau cosmique quand tout sera prêt avec une sécurité adéquate au maximun".

 

Le 06 avril 1961

Une conférence technique est donnée à 11 h 30 (heure de Moscou). En présence des membres de la Commission, tous les constructeurs sont présents. Korolev fait un exposé sur le système de régénération du vaisseau. Un spécialiste présente les résultats s'essais concernant le scaphandre, le siège éjectable et les parachutes. A la fin de la séance, le professeur Keldych*, le général Kamanine**, Korolev et d'autres responsables signent l'ordre de mission du cosmonaute pour un tour de la Terre et un changement éventuel de programme. Dans la soirée, Gagarine et Titov répètent la position à prendre sur le siège du "Vostok", au moment de l'éjection.

* Mathématicien, président de l'Académie de Sciences - ** Il dirige le centre de préparation des cosmonautes.

Le 07 avril 1961

Le matin, les cosmonautes s'entraînent, ils mettent au point la descente avec commande manuelle et les opérations à effectuer après l'atterissage. Ensuite le programme prévoit deux heures de sport. Le soir est projeté un court-métrage sur les vols des vaisseaux cosmiques inhabités.

Le 08 avril 1961

La Commission d'Etat se réunit à nouveau. Après avoir adopté le programme de vol, elle entend les rapports concernant la mise en place des dispositifs de poursuite et de recherche. Sur proposition de Kamanine, la Commission confirme que le pilotage du " Vostok-1 " est confié à Youri Gagarine.

Le 09 avril 1961

Journée de repos ( sport, films, jeu d'échecs).

Le 10 avril 1961

A 11 heures, a lieu une rencontre avec les spécialistes qui ont préparés le vol. On note la présence de Vassilii Parine, grand spécialiste de médecine cosmique, et du constructeur principal des moteurs, un savant éminent, qui s'occupe des fusées depuis de nombreuses années et qu'on a surnomé " le Dieu du Feu ".
La Commisiion d'Etat se réunit dans la soirée. Korolev déclare : " La fusée porteuse et le vaisseau cosmique ont subi le cycle complet des essais à l'usine et sur le cosmodrome. Il n'y a pas de remarque à faire ... ". Il est décidé que le vol aura lieu le mercredi 12.

Le 11 avril 1961

Peu de temps avant le levé du soleil, la fusée est dressée en position verticale. Le compte à rebours commence. Pour Gagarine et Titov, c'est un jour de repos; à 13 heures, les cosmonautes rencontrent l'équipe chargée du lancement. A 21 h 50, le médecin aéonautique Evgueni Karpov (premier commandant du détachement des cosmonautes) les auscultes, puis ils vont se coucher. Korolev passe à la maisonnette pour leur souhaiter une bonne nuit.
Auparavant, pendant plus d'une heure, on a fixeé des capteurs à même la peau de Youri Gagarine; ils permettront aux savant de surveiller les principales fonctions physiologiques.

Le 12 avril 1961 - L'aube du grand jour

Les préparatifs se poursuivent toute la nuit sur le cosmodrome. A 1 heure du matin (heure de Moscou), on procède aux vérifications finales de la fusée et du vaisseau.
Sergueï Korolev, le constructeur principal, n'a pas pu trouver le sommeil, c'est pour lui une nuit très longue mais aussi l'examen le plus difficile de sa carrière. Lea sécurité de Youri dépend de son travail.
Deux trains tansportent le combustible et le comburant vers la fusées. Les voitures de pompiers et équipes de sécurité stationnent à proximité; elles assureront la sécurité pendant le remplissage des réservoirs.

A 3 h 30, le médecin Karpov entre dans la chambre où Youri et Guerman dorment. " Il est l'heure de se lever " leur dit-il. Puis ils se rendent au gymnase pour une mise en train, puis toilette et déjeuner "à la cosmique". Au menu : purée de viande, café, marmelade de cassis (tout cela en tubes). Après un dernier examen médical, les deux hommes se rendent à la salle d'habillage où des spécialistes les aident à endosser leur lourd scaphandre orange.

Korolev entre dans la salle, il semble préocupé et surtout fatigué. Youri le rassure : " Tout marchera bien. N'ayez aucune crainte. Je suis sûr de moi et sûr du vaisseau ". Korolev sourit; il est sûr, lui aussi, que tout se passera bien.

A 4 heures, alors que le soleil se lève sur la steppe, la commission d'Etat se réunit une dernière fois; la séance est brève car tout est prêt. Les cosmonautes qui viennent de distribuer leurs premiers autographes, montent dans l'autobus bleu ciel, qui doit les conduire sur l'aire de lancement. On branche leur équipement de ventilation du scaphandre qui est alimenté par des sources d'énergies installées dans le véhicule. Il fait beau et le ciel dégagé.

Avant même d'arriver, un des savants, ne pouvant plus contenir son émotion, se penche vers Youri, l'étreint et fond en larmes. Mais quelques heures plus tard, il pleurera à nouveau, mais cette fois, ce seras de joie.

A 6 h 50, l'autobus s'arrête au pied de la fusée. Les académiciens Korolev et Keldych disent au revoir à Gagarine; ce dernier se dirige vers le président de la Commission d'Etat et lui déclare : " Le pilote Gagarine est prêt pour le premier vol à bord du vaisseau cosmique " Vostok" ". -- " Bon voyage, bonne chance, lieutenant ", répond simplement le président.
Après une déclaration à la presse, Youri entre dans l'ascenseur qui va le conduire au sommet de la fusée-porteuse.

Voici tous les messages échangés entre Youri et le centre de contrôle,

jusqu'au retour sur la Terre.

Kedr (cèdre = indicatif de Youri) / Zaria : indicatif de liaison

A 7 h 10, Youri Gagarine est installé dans le "Vostok", entre en contact avec le centre de liaison et entreprend la vérification de son scaphandre.

Vers 7 h 30, il termine le contrôle des systèmes de liaison.

 
 

07 h 32 

  • Zaria (Korolev): - M'entendez-vous bien ? J'ai quelque chose à vous transmettre.
  • Kedr : - Je vous entends bien.
  • Zaria : - Youri Alekseevitch, je veux simplement vous rappeler qu'après la préparation minutée, il y aura encore 6 minutes avant que le vol ne commence. Je vous dis ça pour que vous ne vous énerviez pas.
  • Kedr : - Compris. Je suis parfaitement calme.
  • Zaria : - Eh bien, c'est parfait, très bien. Après la préparation minutée, ces 6 petites minutes seront pour ainsi dire, bien remplies. Je vous passe le président.

Le président de la Comission d'Etat est un éminent spécialiste civil et un organisateur remarquable. 
C'est lui qui a eu la lourde responsabilité de coordonner le travail de tous les organismes ayant participé à la préparation du vol " Vostok ". 

  • Zaria (le président): - Youri Alekseevitch, comment allez-vous, quoi de nouveau de votre côté, que voyez-vous à travers le hublot? 
    (Il s'agit d'une plaisanterie : le vaisseau étant recouvert par sa coiffe, Youri ne voit rien.) 
  • Kedr : - Tout marche bien, je vérifie le fonctionnement des systèmes. Compris?
  • Zaria (Korolev): - Bien compris. Le président vous entend.Chez nous, tout marche normalement.

 

07 h 34 

  • Zaria (Popovitch): - Youri, comment ça vas?
  • Kedr : - Comme je l'ai appris (rire).
  • Zaria (O; Muguet = indicatif de Popovitch): - Ma foi, bien, bien, allez. Tu as compris qui te parle?
  • Kedr : - J'ai compris : c'est "Muguet" (rire)
  • Zaria (Popovitch): - Nous chanterons ce soir

Pavel Popovitch est le maître de chorale de l'équipe des cosmonautes. Tous les habitants de la Cité des Etoiles l'ont entendu chanter de sa voix grave, les vieilles mélodies du folklore ukrainien.

 

07 h 44

  • Zaria (Korolev): - Ici tout marche parfaitement. Comment vous sentez-vous ?
  • Kedr : - Compris. Chez moi aussi, tout va bien; je me sens bien; à présent, on va fermer l'écoutille n° 1.

 

07 h 47

  • Zaria : - Comment me recevez-vous? je vérifie la liaison depuis le bunker.
  • Kedr : - Je vous recois bien. Parlez un peu moins fort. Compris?
  • Zaria : - Bien compris.

 

07 h 57

  • Kedr : - Je voudrais parler au 20è (Korolev).
  • Zaria (Korolev): - 20è à l'écoute
  • Kedr : - Pendant la liaison sûre, lors de la phase active, il faudrait communiquer le temps évalué en secondes par rapport à la seconde du départ, que ce soit avant ou après.
  • Zaria : - Compris, compris. Votre souhait sera réalisé, Youri Alekseevitch.

Peu avant 8 heures, les techniciens doivent faire face à une petite difficulté. Un voyant de contrôle de l'étanchéité de la porte ne s'est pas allumé.

 

07 h 58

  • Zaria (Korolev): - Youri Alekseevitch, il nous est arrivé ceci: après la fermeture de l'écoutille, un contact n'as pas confirmé qu'il était serré; c'est pourquoi nous allons certainement ôter le panneau, puis nous le remettrons en place. Compris?
  • Kedr : - Bien compris. On ouvre l'écoutille, on vérifie la signalisation.
  • Zaria : - Alors c'est parfais, bien.

 

08 h 05

  • Zaria (Kamanine): - On annonce T - 1 heure. Continuez l'examen de l'équipement. Bien compris.
  • Kedr : - Compris. On annonce T - 1 heure. Tout est normal. Je me sens bien, le moral très bon, je suis prêt pour le départ.

Titov, mis en confiance par ces bonnes nouvelles, décide d'aller retirer son scaphandre, son casque et sa combinaison. Après avoir enfilé des vêtements terrestres, il se rendra au centre de télécommande et de télémesure à 3 km de la fusée, pour écouter la conversation entre Korolev et Gagarine.

 

08 h 08 

  • Zaria (Kamanine): - A présent, voilà les wagons de chemin de fer qui partent. 
    Je voudrais bien savoir: vous les entendez, ou non? 
  • Kedr : - Je n'entends pas le départ de ces wagons. Il y a pas mal de vacarme; je vous entends à peine.
  • Zaria (Kamanine): - C'est clair, bien compris.

 

08 h 10 

  • Zaria (Kamanine): - On annonce T - 50 minutes.
  • Kedr : - Bien compris. On annonce T - 50 minutes.

 

08 h 13 

  • Zaria (Korolev): - Comment me recevez-vous? On a déjà commencé à poser le couvercle, problablement?
  • Kedr : - Je vous reçois bien. Visiblement, on a déjà fini de visser le couvercle (il s'agit de l'élément de bouclier thermique recouvrant l'écoutille).
  • Zaria : - Compris; de notre côté, tout marche bien.
  • Kedr : - De mon côté aussi, tout va bien. Je me sens bien. Le moral est bon.
  • Zaria : - Très bien. On vient juste de nous appeler de Moscou pour savoir comment vous alliez. Nous leur avons dit que tout était normal.
  • Kedr : - Bien compris. Vous avez bien fait.

 

08 h 14 

  • Zaria (Popovitch): - Youri, tu ne t'ennuies pas là-bas?
  • Kedr : - Si vous avez de la musique, vous pouvez m'en mettre un peu.
  • Zaria : - Une minute.

 

08 h 15

  • Zaria (Korolev): - Il est probable qu'en ce moment, vous entendez beaucoup de bruit. 
    C'est qu'on est en train d'abaisser les plates-formes de services. 
    Tous les travaux sur les fermes sont terminés. Reçu? 
  • Kedr : - Reçu. On abaisse les plates-formes de services, mais je n'entends pas le bruit. 
    Je perçois quelques vibrations. 
  • Zaria : -C'est compréhensible. Tout est normal... Station "Zaria", accédez à la demande de "Kedr". 
    Donnez-lui de la musique. 
  • Zaria (Popovitch): - Vous avez entendu? 
    Zaria répond : on s'en occupe. Voilà, donnez-lui de la musiquette, sinon il s'ennuie.

 

08 h 17

  • Zaria (Popovitch): - Eh bien, y a-t'il de la musique?
  • Kedr : - Pas pour l'instant, mais j'espère qu'il va y en avoir maintenant.
  • Zaria : - Ma foi, tu as entendu: ils te l'ont promise.
  • Zaria (Korolev): - Eh bien, on vous a donné de la musique, non?
  • Kedr : - Pas pour l'instant.

 

08 h 19

  • Zaria (Korolev): - Naturellement, voilà bien les musiciens: un instant ici, un instant ailleurs, ils traînent, comme on le dit toujours.
  • Kedr : - On m'a donné une chanson d'amour.
  • Zaria : - On vous a donné une chanson d'amour? Ca me semble raisonnable, Youri Alekseevitck.

 

08 h 25

  • Zaria (Korolev): - On vérifie l'étanchéité. Tout est normal, tout est parfaitement en règle. Compris?
  • Kedr : - Compris. L'étanchéité est en règle. J'entends et j'observe: l'étanchéité a été vérifiée.
    On frappe légèrement sur quelque chose-là. 
  • Zaria : - Bon, c'est parfait. Tout va bien.

A présent les techniciens branchent l'appareillage de télévision. Ils découvrent, sur leurs écrans, le visage de Gagarine, qui regarde droit dans l'objectif en souriant.

 

08 h 27

  • Zaria (Korolev): - Nous venons de vous voir sur l'écran de télévision; tout est normal; votre mine nous a réjouis: en pleine forme. Comment me recevez-vous?
  • Kedr : - Je vous entends bien, je me sens bien, le moral est bon. Prêt pour le départ.
  • Zaria : - Ma foi, c'est parfait, bien. Ici, tout marche normalement.

A 30 minutes du départ, tous ceux qui désirent assiter au lancement et écouter les communiqués des télémétristes, se rendent au centre de télécommande et de télémesure. Kamanine, Popovitch et Korolev, qui assureront la liaison avec "Vostok", passent dans le bunker de commande. 
Pour accéder au bunker, il faut descendre quelques marches; à l'intérieur, plusieurs salles sont disposées de part et d'autre d'un corridor (l'une d'elles est réservée aux membres de la Commission d'Etat). Là, nous sommes si près de la fusée que, lorsqu'on regarde par un périscope, il est impossible de la voir toute entière.

 

08 h 45

  • Kedr : - A combien sommes-nous?
  • Zaria (Kamanine): - A T - 15 minutes. Je vous rapelle
  • Kedr : - J'ai mis les gants. Tout est normal.

 

08 h 55

  • Zaria (Korolev): - On annonce T - 10 minutes. Comment est votre casque; est-il fermé ? 
    Fermez le casque. Confirmez. 

Gagarine porte la main à son casque et il appuie sur un petit loquet. La visière de protection s'abaisse et le scaphandre se branche 
automatiquement sur l'alimentation autonome. 

  • Kedr : - Compris. On annonce T - 10 minutes. Le casque est fermé. Tout est normal, je me sens bien, prêt pour le départ.
  • Zaria (Kamanine): - Reçu. 

 

08 h 56

  • Zaria (Kamanine): - T - 5 minutes. Mettez la puissance sur le maximun, puissance sur le maximun.
  • Kedr : - Compris: on annonce T - 5 minutes. Mettre la puissance sur le maximun. C'est fait. 

 

09 h 00

  • Zaria (Korolev): - De notre côté, tout est normal. 
    Jusqu'au début de nos opérations - jusqu'à T - 1 minute 
    - il reste encore deux minutes. Comment me recevez-vous ? 
  • Kedr : - Je vous recois bien. Compris : jusqu'au début des opérations, il reste encore deux petites minutes.
    Je me sens bien, le moral est bon, je suis prêt pour le départ, tout est normal. 

 

09 h 03

  • Zaria (Korolev): - Au moment du départ, vous pourrez ne pas me répondre. Répondez dans la mesure de vos moyens, car je
    transmettrai les détails. 
  • Kedr : - Compris. 

Léonide Voskressenskii, l'adjoint de Korolev pour les essais, donne l'odre de brancher tous les systèmes permettant la mise à feu 
depuis le pupitre central : 
- " Clé sur "départ"." 
Encore un instant, et le directeur technique du vol appuie sur le bouton de "lancement". 
A partir de maintenant, et jusqu'à l'allumage, le processus va être entièrement automatique.

 

09 h 06

  • Zaria (Korolev): - Les pressurisations sont en cours. Le mât ombilical s'est écarté, tout est normal. 

 

09 h 07

  • Zaria (Korolev): - C'est la mise à feu, " Kedr ". 
  • Kedr : - Compris : c'est la mise à feu. 
  • Zaria : - Degré préliminaire... intermédiaire... principal. Décollage. 
  • Kedr : - On y va ! Dans la cabine, on entend faiblement le bruit. Tout se passe normalement, je me sens bien, le moral est bon,
    tout est normal. 
  • Zaria : - Nous vous souhaitons tous un bon vol, tout est normal. 
  • Kedr : - Au revoir, à bientôt, chers amis.
  • Zaria : - Au revoir, à bientôt.
  • Kedr : - Les vibrations s'intensifient, le bruit augmente quelque peu, je me sens bien, les surchages continuent à augmenter.

 

09 h 08

  • Zaria (Korolev): - Temps - 70 (70 secondes depuis le départ). 
  • Kedr : - Compris : 70. Je me sens en parfaite santé, je poursuis le vol, les surchargent augmentent, tout va bien. 
  • Zaria : - 100, " Kedr". Comment ça va ? 
  • Kedr : - Ca va bien.
  • Zaria : - D'après la vitesse et l'heure, tout est normal. Comment vous sentez-vous ? 
  • Kedr : - Je me sens bien. Les vibrations et les surcharges sont normales. 
    Je poursuis le vol. Tout est parfait. 
  • Zaria : - Tout est en ordre, la machine marche bien. 
  • Kedr : - Le premier étage a cessé de fonctionner. Les surcharges et les vibrations ont diminué.
    Le vol se poursuit normalement, je me sens bien. J'ai senti la séparation. 
    - Le deuxième étage est en action. Tout est normal. 

 

09 h 10

  • Zaria (Korolev): - Le cône s'est détaché, tout est normal. Comment ça va ?
  • Kedr : - Le largage du cône de tête a eu lieu. Je vois la Terre dans le "Vzor". On distingue bien. Les surcharges augmentent
    quelques peu, je me sens à la perfection, le moral est bon. 

 

09 h 11

  • Zaria (Korolev): - Bravo, parfait. Tout marche bien. 
  • Kedr : - Compris. Je vois des fleuves. On distingue bien les plis du terrain. 
    - Tout est parfaitement visible dans le "Vzor". La visibilité est bonne. Je vais très bien. Je poursuis le vol. 
    - Les surchages et les vibrations augmentent quelque peu. Je supporte tout normalement. 
    - Je vais très bien, le moral est bon. 
    - J'observe la Terre dans le hublot "Vzor". Je distingue les formations locales, la neige, une forêt. Je vais très bien. 
    - Comment marche votre travail ? 
    - J'observe des nuages au-dessus de la Terre, de petits cumulus et leur ombre portée. 
    - Que c'est joli, que c'est beau. 

 

09 h 12

  • Kedr : - Le deuxième étage a cessé de fonctionner. 
  • Zaria (Korolev): - Ca marche comme il faut. Dernière étape. Tout est normal.
  • Kedr : - Compris. J'ai entendu l'allumage, je sens le fonctionnement. Je vais très bien. La visibilité est bonne. 
  • Zaria : - Compris 
  • Kedr : - Le vol se poursuit sans incident. Le 3ème étage est en marche. La télévision fonctionne. Je me sens à la perfection, le moral est bon. - Tout se passe bien. Je vois la Terre, je vois l'horizon dans le "Vzor". L'horizon se déplace quelque peu vers
    mes pieds. 

Encore quelques instants, et le vaisseau sortira de la zone où une liaison radio directe avec le cosmodrome est possible. Alors, "Kedr" 
entrera en communication avec une autre station, située plus à l'est. 

09 h 18 mn 07 sec : à la verticale du bourg sibérien d'Outchoumi, le "Vostok" se sépare du dernier étage de la fusée porteuse. 
Gagarine est en état d'apesanteur; le premier vol de l'homme dans l'espace cosmique a commencé. 
Les informations affluent au centre de coordination et de calculs, situé à des centaines de kilomètres du cosmodrome; le centre est chargé de coordonner le travail des points de télécommande et de télémesure, disséminés sur le territoire de l'Union Soviétique. Mais le complexe de poursuite ne comprend pas seulement des stations terrestres : dans le golfe de Guinée, des navires se préparent à assurer le contrôle télémétrique des systèmes de bord du vaisseau cosmique. 

Parmis les spécialistes qui assurent la commande du vol, un jeune ingénieur, sorti deux ans plus tôt de l'Institut d'Aviation de Moscou, écoute attentivement la conversation entre "Kedr" et "Zaria" ; il s'appelle Vitali Sevastianov. Comme son collègue Féoktistov, il a participé à la préparation du "Vostok" ; en 1967, il entrera dans le détachement des cosmonautes et, 3 ans plus tard, il volera à bord du "Soyouz-9".

 

09 h 27

  • Zaria (station du Kamtchatka): - Le 20è (Korolev) ne reçoit pas vos indications, le vol se déroule normalement.

Tout à l'heure, en effet, quand on est passé des communications par le PC du cosmodrome au relais des centres de liaisons, il y a eu quelques difficultés. Korolev, à Baïkonour, n'entendait plus le cosmonaute ; quand le grand savant s'empara du micro, ses mains tremblaient, sa voix était entrecoupée. Ce fut un soupir de soulagement quand le centre des communications et Moscou confirmèrent que la liaison était rétablie par une autre station et que le vaisseau était sur orbite. 

  • Kedr : - Compris. Le 20è ne reçoit pas mes indications. Communiquez vos données sur le vol. Salut à Blondin.

"Blondin", c'est le surnom d'Alexeï Léonov, le futur "piéton de l'espace". C'est lui qui est de service dans la station la plus orientale, celle du Kamtchatka, implantée sur la côte rocheuse de la mer d'Okhotsk. 

  • Zaria (station du Kamtchatka): - Comment me recevez-vous ?
  • Kedr : - Je vous reçois bien. Et vous ?
    - J'ai ouvert le hublot "Vzor". Je vois l'horizon de la Terre. Il flotte. Mais les étoiles ne sont pas visibles dans le ciel. - On voit la surface terrestre dans le hublot. Le ciel est noir. Une belle auréole bleue s'assombrit en s'éloignant de la Terre.

Conformément au programme de vol, Youri doit remplir le "journal de bord". Il s'agit, surtout, de vérifier s'il est aussi facile d'écrire en état d'apesanteur que sur Terre. Le "journal de bord", ce n'est qu'une mince planchette de plastique ; une face est entièrement blanche ; le cosmonaute y prend quelques notes : 

09h33. Entré dans l'ombre de la Terre. On ne voit plus rien par le hublot. 
09h42. Dans l'ombre. Je me sens bien. J'écoute "Les flots du fleuve Amour" (chanson très populaire en Union Soviétique; elle est transmise par la station de Khabarovsk)."

De l'autre côté de la planchette, des questions sont imprimées. Il faut simplement noter la réponse, en face de chacune d'elles : 

- Possibilité de déterminer le mouvement du vaisseau : on peut. 
- Visibilité de la Terre et de l'horizon : bonne. 
- Couleur du ciel : noire. 
Etc...

Mais voici que Youri laisse échapper son crayon, qui se met à flotter librement dans la cabine, avant de disparaître derrière le siège. Plus question de prendre des notes; à présent, il faudra consigner les observations sur le magnétophone de bord. 

Le programme prévoit aussi un repas; le menu a été préparé par les savants de l'Académie de Médecine. La nourriture se présente en tube de 160 grammes, en aluminium. Quand à l'eau de boisson, elles est contenue dans un réservoir de polyéthylène, avec un tuyau terminé par une embouchure spéciale. Pour boire, le cosmonaute la prend entre ses dents, il appuie sur le bouton du dispositif d'écoulement et il suce.

 

09 h 47

  • Kedr : - "Vesna", comment me recevez-vous ? Transmission d'un nouveau rapport : 9 h 48, le vol se poursuit avec succès. "Descente 1" marche normalement. L'index....

La liaison avec "Zaria" s'interrompt, comme prévu. Les communications vont se poursuivre par "Vesna", système de transmission à longue distance.

 

09 h 49

  • Kedr : - Je n'entends pas la Terre. Je me trouve dans l'ombre.

 

09 h 51

  • Kedr : - L'orientation solaire a été enclenchée.
  • Vesna : - Compris.

 

09 h 53

  • Vesna : - Le vol se déroule normalement, vous êtes sur l'orbite prévue.

 

09 h 55

  • Kedr : - Compris, le vol se déroule normalement, je suis sur l'orbite prévue.

 

09 h 57

  • Kedr : - Le moral est bon, je poursuis le vol. Je me trouve au-dessus de l'amérique.
  • Vesna : - Compris, vous vous trouvez au-dessus de l'amérique.

 

10 h 04

  • Kedr : - 10 heures 04 minutes. Je me trouve dans l'ombre de la Terre. Je transmet un nouveau rapport. Je suis à l'apogée. "Descente 1" fonctionne. L'orientation solaire fonctionne. Pression dans la cabine - unité. Humidité 65%. Température 20°C.

 

10 h 06

  • Kedr : - Attention. Je vois l'horizon de la Terre. Une auréole magnifique. D'abord un arc-en-ciel qui part de la surface même de la Terre et qui passe dessous. C'est très beau. Tout cela par le hublot de droite. Je vois des étoiles dans le "Vzor", je vois comment elles passent. C'est un très beau spectacle. Le vol se poursuit dans l'ombre de la Terre. A présent dans le hublot de droite, j'observe une étoile. Elle passe de gauche à droite dans le hublot. Elle a filé, la petite étoile. Elle s'en va, elle s'en va.
  • Vesna : - Compris.

 

10 h 09

  • Kedr : - Attention, attention ; 10 heures 09 minutes 15 secondes ; je suis sorti de l'ombre de la Terre. A travers le hublot "Vzor", on voit apparaître le Soleil, l'objet tourne. Visiblement, le système d'orientation solaire est entré en action. Voilà qu'à présent j'observe la Terre par le "Vzor". J'observe la Terre. Je survole la mer. On peut déterminer entièrement la direction du mouvement au-dessus de la mer. En ce moment, je me déplace à peu près sur le flanc droit. On peut entièrement déterminer l'orientation de l'objet.
  • Vesna : - Compris.

 

10 h 18

  • Kedr : - "Vesna", ici "Kedr" ; "Vesna", ici "Kedr". 10 heures 18 minutes. Pression dans le système d'orientation : 120 atmosphères. Pression dans le ballon de l'AMF : 320 atmosphères. Je me sens bien, le vol se poursuit avec succès. Compris ? Réception. Tout les systèmes marchent bien.
  • Vesna : - Compris. Tout est normal.

 

10 h 24

  • Kedr : - "Vesna", ici "Kedr" . Le vol se poursuit avec succès. Je vais très bien. Tous les systèmes fonctionnent bien. A 10 heures 23 minutes.

A 10 h 25, l'appareillage de programmation délivre l'odre d'allumage de la rétro-fusée. Dix minutes plus tard, après s'être s'éparée du compartiment des appareils, la cabine pénètre dans les couches denses de l'atmosphère.

La récupération

Au Pc du groupe de récupération, à Kouibychev, les généraux Andreï Trofimovitch, K.T. Tsedrick et A.T. Stouchenko, vérifient, une dernière fois, les moyens de liaisons. Sous leur responsabilité, les spécialistes ont mis sur pied un dispositif de recherche, qui doit permettre de repérer rapidement le cosmonaute et de lui apporter l'assistance néccéssaire.

La région d'atterrissage a été divisé en secteur ; sur chacun, on a implanté des postes d'observation, dotés de récepteurs goniométriques et de moyens visuels d'observation. Des procédés spéciaux de recherches ont été prévus dans le cas où "Vostok" se poserait sur la couverture d'une forêt, dans des broussailles ou dans une région marécageuse. Des détachements, comprenant des médecins, sont prêts à intervenir pour rechercher le cosmonaute et pour le transporter dans un lieu de repos.

Selon la topographie, ils disposent d'avions, d'hélicoptères, de véhicules tout terrain, de canots et même de chariots tirés par des chevaux. Plusieurs médecins-parachutistes (parmi lesquels, le futur cosmonaute Boris Egorov) sont en alerte depuis 06 heures du matin; ils devront intervenir si le vaisseau s'écarte de la région d'atterrissage.

Un groupe, conduit par le général d'aviation F.A. Agaltsov, avec Kamanine et Titov, a quitté l'aérodrome de Baïkonour pour se rendre à Kouibychev, où aura lieu l'accueil de Gagarine.
Ils sont encore à bord de l'Antonov-12 quand ils reçoivent le communiqué :
 

" Le vaisseau cosmique s'est posé à 10 heures 55 près du village de Smelovka, à 23 km de Saratov. "

A bord, la joie éclate. Vassilii Parine débouche une bouteille de cognac; Kamanine modère son enthousiasme et lui conseille
d'attendre encore un peu, jusqu'à l'entrevue avec le cosmonaute.

Il y a quelque minutes, en effet, la cabine récupérable a regagné la Terre, devant les regards ébahis d'une vieille femme et de sa petite fille Rita. Gagarine a ouvert l'écoutille. Comment ne pas être apeuré, en voyant cet être, étrangement vêtu, émerger du vaisseau, puis avancer en se dandinant ?
 

" - Vous ne venez pas du cosmos, par hasard ? " lui a demandé la vieille femme. 
" - Figurez-vous que oui ! "

Mais déjà, un groupe de soldats arrive en camion ; ils aident le cosmonaute à se débarrasser de son scaphandre et ils installent un poste de garde auprès du vaisseau.

Quelques minutes plus tard, un hélicoptère MI4, du groupe de récupération, se pose à proximité du Vostok. Le commissaire sportif Ivan Borissenko enregistre les premiers records, conformément au règlement de la Fédération Aéronautique Internationale : record d'altitude (327 km), de temps (108 mn), de poids du vaisseau cosmique (4.725 kg). Puis l'hélicoptère reprend l'air, emmenant Youri Gagarine dans un aéroport proche. Avant de reprendre l'avion pour Kouïbychev, il téléphone à Moscou, aux dirigeants soviétiques, et il se repose un peu.

Vers 04 heures de l'après-midi, un Illiouchine-14 se pose sur l'aérodrome de Kouïbychev. Gagarine est le premier à en sortir.

C'est l'émotion des retrouvailles ; Stouchenko, Kamanine, Agaltsov embrassent le cosmonaute.
L'envoyé de La Pravda réalise la première interview :
 

Q. 
Y.G. 
Q. 
Y.G.

- Comment est le ciel, la-haut ? 
- Obscur, camarade, très obscur. 
- Et la Terre, comment la voit-on ? 
- Elle est bleuâtre.  
- Quand je survolais l'Amérique du Sud et l'Afrique, j'ai vu la côte des grands lacs.  
- C'est un tableau admirable. (...)

A Titov, qui lui demande s'il est content, notre héros répond simplement : " Et comment. Tu le seras aussi, la prochaine fois."

Mais la foule grossit rapidement. Youri Gagarine est en bonne santé, mais la fatigue commence à se faire sentir ; les médecins lui conseillent d'aller se reposer. Il monte dans la voiture, qui va le conduire à la maisonnette, spécialement aménagée sur la rive de la Volga.

Mais laissons-le raconter la fin de cette extraordinaire journée :
" - J'ai pris une douche, puis j'ai mangé, cette fois comme on le fait sur la Terre, avec un bon appétit de Terrien. "
" - Après une courte promenade au bord du fleuve, nous avons, Titov et moi, fait une partie de billard... "
" - Quelques minutes après nous être couchés, nous dormions aussi paisiblement que la veille du vol. "

Le lendemain 13 avril, de 9 h 30 à 12 h, Youri Gagarine fait le récit de son vol, en présence des membres de la Commission d'Etat et des représentants de l'industrie. L'après-midi, il joue à nouveau au billard et il se promène sur les rives de la Volga.
Dans la soirée, après avoir rédigé une allocution pour la réception de la place Rouge, il essaie son nouvel uniforme.

Le lendemain, il partira pour Moscou où il recevra le plus extraordinaire accueil jamais réservé à un humain.


 

 Le triomphe : Youri Gagarine
 

Serguei Korolev et son équipe ont réussi en un temps record à concevoir, construire et mettre au point une cabine spatiale dont les équipements concilient simplicité, robustesse et efficacité. Ils ont résolu tous les problèmes que posent l'entraînement d'un cosmonaute et la survie d'un homme dans l'espace. 



 

Le charik s'est posé. 
Les équipes de récupération arrivent en hélicoptère. 

Cette photo montre la cabine soviétique sphérique avec sa structure en nid d'abeille et a gauche, le parachute. 
S'il ne s'ouvre pas, le cosmonaute du Vostok a la possibilité de commander l'éjection de son siège, faculté dont en fait il usera systématiquement pour s'éviter un contact trop rude avec le sol. 
Le << globule >> atterit en effet à la viresse de 10 m/s alors qu'avec son parachute individuel, c'est à 5 m/s que le cosmonaute atteindra le sol.


 

 

 Le premier homme à avoir quitté la Terre est un Russe. 
 

Il est membre du Parti communiste (il sera élu député de Smolensk). Ceux qui l'ont rencontré ont découvert en lui un pilote d'avion dynamique autant qu'extrêmement sympatique. Elena et Gaela accueillent leur père lorsque Youri Gagarine revient à leur maison, après son grand voyage.